Eloge à la mémoire de l’Abbé Henri de Villeneuve

Discours prononcé par Claude Castan Président du Comité d’Entente des Associations d’Anciens Combattants de Castres le 20 juillet 2021 à la cérémonie de Fontbruno (Tarn) .

FONTBRUNO 20 juillet 2019
Pour que les hommes restent des hommes de leur baptême à leur sépulture.

Cérémonie à Fontbruno le 20 juillet 2021.

20 juillet 1947, 20 juillet 2021, 74 ans que des hommes et des femmes se réunissent au pied de ce Monument, fidèles aux vœux des Anciens du Corps Franc de la Montagne Noire.

Eux ont connu la France envahie, asservie, coupé en deux ne semblant avoir que pour seul avenir la collaboration avec l’ogre nazie maître de toute l’Europe de l’ouest.

Bien sur il y avait là bas outre Manche un Général qui disait que tout n’était pas perdu et que la flamme de la résistance ne s’éteindrait pas car la France n’était pas seule.

Il faudra attendre 4 longues années pour que renaisse l’espoir au matin du 6 juin 1944 en Normandie sans oublier que la veille le Général Juin un camarade de promotion du précédent défilait avec ses troupes dans Rome libérée. Viendra ensuite, le 15 août, le débarquement de Provence avec la 1ère Armée Française conduite par de Lattre de Tassigny.
Mais tout cela eut-il été si facilement réalisé sans la Résistance. Non, non et non !

Si nous sommes là aujourd’hui pour commémorer le 77 anniversaire de l’attaque allemande du 20 juillet 1944 contre le CFMN, c’est parce que des hommes se sont levés pour, dans l’ombre puis au grand jour, organiser et conduire la lutte interne.

Tous ceux dont les noms sont gravés au pied de ce monument non hélas pas connu la joie de la France libérée, victorieuse, libre…

Parmi tous ces hommes, il en est un qui combattra sans arme, mais qui seulement guidé par sa Foi sera pour tous le réconfort et la lumière de l’espoir renouvelé qui luit au bout du tunnel des années sombres…

Défilé du 7 septembre 1944 à Castres. En tête d’un défilé de 500 hommes, au centre l’abbé Villeneuve marche avec une canne suite à la blessure reçue à la Mouline le 23 Août.

Pons Marie Ludovic Michel Henri de Villeneuve est né à Hauterive commune de Castres le 20 octobre 1904 de Pons Marie Joseph Louis de Villeneuve 29 ans officier 4ème régiment de cuirassé basé à Cambrais et de Henriette Laure Marie Simone Carayon Latour 24 ans. Son grand père le Comte Pons Louis Raymond Roger de Villeneuve St Cyrien ancien officier chevalier de la Légion d’Honneur est témoin signataire de la déclaration de naissance.
Après ses études secondaires chez les Jésuites de Sarlat Henri de Villeneuve rejoint les Jésuites de Versailles afin de préparer l’examen l’entrée à l’Ecole Spéciale Militaire St Cyr.
Mais l’appel de la Foi ne lui permettra pas de prolonger la lignée militaire familiale.
Le Séminaire d’Albi (1922), puis l’Institut Catholique de Toulouse pour obtenir les diplômes de philosophie et théologie « cum laude » (1925-1927) précédèrent son ordination en la cathédrale Sainte Cécile d’Albi en 1928. Nommé Vicaire de Labruguière il lance en 1929 la Jeunesse Ouvrière chrétienne Féminine dans le diocèse et en devient l’aumônier. En 1932, c’est à l’Université Catholique de Lille qu’il se distingue par ses écrits sur « ouvriers de demain : notes et réflexions sur la préparation à la vie de travail ». De retour dans le Tarn il assure jusqu’en 1944 l’aumônerie fédérale du diocèse pour la JOCF.
L’engagement dans la résistance commence par la distribution dans le Tarn des 13 numéros de Témoignage Chrétien de 41 à 44, auxquels s’ajouteront le journal Combat. Puis en 1943 c’est le choc du STO. Aussi lorsque son ami de longue date François Reille Soult chef des MUR, lui propose en quelque sorte de devenir aumônier départemental des Maquis en plus de ses activités, il franchit le pas. D’autant plus qu’il se lie avec Kervanoael alors chef départemental des équipes d’urgence de la Croix Rouge.
L’Abbé est présent le 20 avril 1944 à Castres lors de la rencontre des chefs Mompezat, Sévenet, Kervanoael donnant naissance au CFMN. Et c’est sur la moto de Roger Langlois second de Kerva qu’il suit les chefs pour la visite du maquis de Lattre de Tassigny à Martinou, près de Lacaune. Il reste sur place pour une veillée avec les jeunes et redescend le lendemain évitant ainsi l’attaque allemande du 22 avril. Après le débarquement Allié en Normandie le 6 juin il ne quitte plus le CFMN.
Il suit les opérations et les combats apportant toute l’aide possible pour les plaies des corps et des âmes. Donnant de sa personne jusqu’au dernier combat à La Mouline où ayant reçu une balle dans la cuisse il veille au bon repli des uns et des autres. Grâce à sa sœur cadette Monique qui dirige à proximité une colonie de vacances la balle allemande convoyée à vélo jusqu’a Castres sera remise à son père Louis le 25 aout jour de sa fête patronyme.
Mais il faut pourchasser et terrasser l’ogre nazi, c’est pourquoi le capitaine Henri de Villeneuve suit encore Kervanoael et ses cavaliers au sein du bataillon Montagne Noire intégré au 8ème régiment de dragons devenant aumônier du régiment.
Le 20 juillet 1947 jour de l’inauguration de ce monument de Fontbruno il recevra des mains du général de Lattre de Tassigny la Croix de Chevalier de la Légion d’Honneur.
De 1945 à 1950 il est aumônier régional en Afrique du Nord pour la Jeunesse Ouvrière chrétienne Féminine.
Les 40 dernière années de sa vie seront consacrées nationalement et internationalement à l’Action Catholique en milieu indépendant voyageant inlassablement à travers toute l’Afrique et l’Amérique du Nord et du Sud, mais gardant toujours le contact avec les anciens du CFMN.

Au cimetière de Laprade l’abbé de Villeneuve repose entre ses camarades de combat Henri Sévenet et Johan de Kervanoël.

Le 24 juin 1978 il fête ses 50 ans de sacerdoce et s’éteint le 19 décembre 1991 à Paris. Ses obsèques le 24 décembre célébrées en l’église St Laurent d’Hauterive, église de son baptême, sont suivies de son inhumation au cimetière de Laprade au coté d’Henri Sévenet et Bernard Jouan de Kervanoael.
Nous rappelant l’élan de notre jeunesse disait ici même, en 1981, l’Abbé Henri de Villeneuve, et les responsabilités que nous avons osé prendre…
quand nous espérions sans savoir quand finirait la nuit…
quand nous serrions les rangs en chantant au soir des jours ou étaient tombés nos camarades…
parce que nous n’avions pas le droit de nous laisser aller à notre peine…
parce que la route de l’avenir nous appelait à marcher…
pour eux… comme eux… la route de la Paix… la route de la Liberté… la route de l’amour fraternel… la route du monde… la route de l’homme…
nous la tracerons comme jadis.

Abbé Henri de Villeneuve,
A nous le Souvenir à vous l’Immortalité !

Dans une Europe pacifiée, si chèrement acquise par nos Grands Anciens, pour que ce monument de Fontbruno garde dans le grandiose décor de la montagne qui nous entoure, toute sa quiétude, nous devons sans cesse dire à tous Nos Jeunes

VIS, AIME, DEVIENS LA FRANCE ! VIS, AIME, DEVIENS LA FRANCE !

Pour que vive la République et vive la France !